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Pratiques culturales Comment réussir sa transition vers l’agriculture de conservation des sols ?

La couverture des sols est l'un des piliers majeurs de l'agriculture de conservation des sols.

Vous vous intéressez à l’agriculture de conservation des sols ? Mais comment se lancer ? Quelles sont les étapes clés pour réussir sa transition ? Tonio Pereira, spécialiste de ces questions à la chambre d’agriculture de Haute-Marne nous livre ses conseils. (Article publié initialement le 23 juin 2023)

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« La couverture des sols, leur perturbation minimale et des rotations diversifiées » sont les trois piliers de l’agriculture de conservation des sols, explique Tonio Pereira, conseiller productions végétales à la chambre d’agriculture de Haute-Marne spécialiste de ces questions, à l’occasion d’une formation Horsch Academy. « Se lancer en ACS ne démarre pas par l’achat d’un semoir de semis direct. Il est nécessaire d’avoir quelques prérequis en tête comme bien connaître son sol et savoir dans quel milieu on évolue. Si le sol est compacté, il faudra, par exemple, chercher à corriger ce problème via l’utilisation d’outils mécaniques et d’installer derrière des racines, grâce aux couverts d’interculture ».

Une période de transition entre 3 et 10 ans

Une période de transition est toujours nécessaire : on peut compter « entre 3 et 10 ans pour passer de la porosité mécanique à la porosité biologique des sols, précise l’expert. Ce temps va varier en fonction du type de sols, mais aussi des façons culturales, de la gestion des couverts, etc. » Si les couverts représentent un des piliers pour réussir la transition, encore faut-il mettre toutes les chances de son côté dans un contexte de changement climatique, avec des étés chauds et secs, de longues périodes sans pluie… Pour Tonio Pereira, il convient tout d’abord de « s’interroger sur le choix des espèces à implanter. On peut s’appuyer sur des mélanges qui sont en capacité de germer dans des conditions plus difficiles et aussi semer plus profond que ce qu’on avait l’habitude de faire, c’est un des moyens pour réussir à avoir des sols couverts ».

Retrouvez tous les conseils de Tonio Pereira dans la vidéo ci-dessous 

À noter : « il ne faut pas non plus s’attendre à obtenir une biomasse de 2 t MS/ha un mois après le semis, cela va mettre forcément plus de temps. Mais le réchauffement climatique est tel que la biomasse qu’on n’aura pas su faire dans les premières semaines après le semis, peut être récupérée au début de l’automne ». Autre règle à avoir en tête pour le choix des espèces : « la durée de l’interculture. En effet, certaines espèces seront plus adaptées en intercultures courtes et au contraire, d’autres plus adaptées sur des temps plus longs. Il faut également faire attention aux cultures présentes dans la rotation. On évitera par exemple pour une succession blé-tournesol de mettre dans le mélange de couvert du tournesol ».

Comment gérer la non-perturbation du sol ?

Une fois qu’on maîtrise la gestion des couverts végétaux, quelle est l’étape d’après ? La limitation du travail du sol. Pour Tonio Pereira, « cela doit être progressif, déjà parce que certaines cultures peuvent nécessiter un travail malgré tout soit pour l’implantation, soit pour la récolte. Le semis direct n’est pas universel et ne s’impose pas à toutes les cultures ».

« On peut faire du semis direct aussi souvent que possible et du travail du sol aussi souvent que c’est nécessaire. »

J’ai pour habitude de dire aux agriculteurs : « on peut faire du semis direct aussi souvent que possible et du travail du sol aussi souvent que c’est nécessaire. C’est sur les cultures qui ne nécessitent pas de travail du sol, qu’on peut commencer à « faire ses armes » sur le semis direct et l’agriculture de conservation en général ».

Dernier point important : l’allongement de la rotation. « C’est un pilier nécessaire dans tous les systèmes. Avec ou sans travail du sol : il est de bon ton, agronomiquement parlant, d’avoir une rotation diversifiée. Mais cela peut être compliqué selon les conditions pédoclimatiques, certaines laissent un choix restreint de cultures ». Pour l’expert, « l’ACS peut apporter une solution complémentaire via l’introduction des couverts végétaux et le développement de cultures associées, permettant une certaine diversité ».

« L’ACS, ce n’est pas adapté pour mon système, mon type de sols… ? »

« Si, il est possible aujourd’hui de faire sans travail du sol dans tous les systèmes, au moins pour quelques cultures », estime Tonio Pereira. « L’ACS fait appel à des connaissances qui ont souvent été oubliées ou mises sous le tapis. Il faut observer l’économie que permet le semis direct, la régularité du développement des cultures… ». « Une culture dans une parcelle qui n’est pas homogène doit alerter l’agriculteur, c’est qu’il se passe quelque chose dans le sol. Et cela mérite un diagnostic, vérifier qu’il n’y a pas un souci de compaction ou de drainage de l’eau pour tenter de le corriger le plus vite possible ».

Bien sûr, « l’ACS n’est pas un mode de production sans embûche. Comme tous, il comporte son lot de difficultés. On pense notamment à l’explosion des populations de limaces. Avec la limitation du travail du sol et le développement des couverts, on va, en effet, créer une diversité qui attire les prédateurs, avant d’attirer les auxiliaires qui pourront venir les consommer ensuite. Le semis direct peut aussi entraîner la prolifération des campagnols terrestres ».

Tous ces éléments sont à avoir en tête. Et l’expert insiste : « il ne faut pas s’enfermer dans un système. Des actions peuvent être corrigées par la réintroduction d’un passage de travail du sol superficiel afin de ne pas rester bloqué dans une situation où les cultures seraient détruites au fil des semaines. Le meilleur système, c’est celui qui assure une productivité sur tous les hectares d’une exploitation et qui limitent les charges », conclut-il.

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